Parfums du temps

Il est une mode étrange aux Seychelles ; celle du parfum. Quand je pense à l’Océan indien et au parfum, je pense à Mayotte que l’on surnomme l’ « île aux parfums » pour sa grande variété de fleurs et plantes aromatiques. Et c’est vrai qu’en me baladant dans la nature, la flore exhalait de douces effluves.

Ici, j’ai aimé les odeurs de végétation le long du sentier pour rejoindre Anse Major. Cette promenade serpente dans une jolie forêt tropicale et longe le bord de mer sur des falaises de granit, aux contours toujours ronds.

En revanche, plus près des humains, j’ai eu droit à plusieurs reprises à des agressions olfactives. Mes mots sont pesés ; comment qualifier autrement ce sillage de parfum éventé dont il ne reste plus que l’alcool fixateur ? Mon nez a été brûlé à plusieurs reprises le matin dans le bus et parfois même en pleine rue lorsque j’ai eu le malheur de me trouver dans un sillage éthérique. Il ne faut pourtant pas être professionnel de la parfumerie pour savoir qu’un parfum tourne avec la chaleur et qu’ici, elle est omniprésente. Je redoute d’ailleurs le pire car on me rappelle un peu tous les jours que le pire est à craindre, que la « vraie » chaleur commencera à arriver à partir du mois de mars. Et moi qui n’appréciais guère le contact de la peau moite de sueur de ma voisine le matin dans le bus…

En revanche et hélas, certains adeptes du spray ne savent pas que les parfums sont bourrés de perturbateurs endocriniens et que l’aspersion quotidienne pourrait bien faire pousser les seins de ces messieurs et activer la pousse capillaire du torse de ces dames…J’avais découvert cette information il y a fort longtemps, lorsque je travaillais en tant que journaliste pour le site internet de santé et de nutrition Santé la Vie. C’était une grande chance de travailler pour ce média libre ; nous échappions aux pressions des laboratoires et pouvions mener nos enquêtes tout à fait librement.

 

Le civisme

 

Toujours concernant le bus, j’aime observer le comportement des quidams et surtout, tester la valeur civique dans ce milieu. Autant j’avais connu la ruée sauvage parisienne, l’ordre australien, la politesse malgache, autant je déplore l’absence de civisme seychellois. On va sans doute trouver mes mots durs et pourrait-on aussi me reprocher d’avoir le verbe et le jugement faciles, moi l’étrangère débarquée il y a quelques semaines à peine (un petit mois et demi en vérité). Mais il reste qu’à deux reprises déjà, j’ai cédé ma place à des personnes âgées et que personne d’autre ne l’aurait fait. J’ai beaucoup de mal à supporter l’idée que ces personnes n’aient pas plus de considération. Mais je dois tout de même nuancer mon propos car à ma grande surprise, une dame était prête à me faire de la place pour que je m’asseye à côté d’elle hier. Dans les bus, il y a des banquettes pour 2 et pour 3 personnes. Généralement, les gens s’assoient là où ils veulent et ne bougent plus. On ne se pousse pas pour que la personne qui monte ensuite puisse s’assoir ; elle doit généralement soit rester debout, soit se débrouiller pour rejoindre sa place, quitte à provoquer des rencontres de genoux.

Inamovible a du sens ici.

L’absence de civisme est troublante ; des barquettes de polystyrène se retrouvent jetées juste à côté des poubelles et des déchets plastiques allègrement balancés par la fenêtre par des adolescents rentrant chez eux dans le bus de fin d’après-midi. Du coup, la pensée _ou absence de pensée_ de l’auteur de cette absurdité m’échappe totalement. Qui irait faire ses besoins à côté des toilettes ? Nous nous retrouvons souvent, mon compagnon et moi, à ramasser des emballages de gâteaux et autres déchets plastiques à la plage (dont les tortues s’étouffent car elles les prennent pour des méduses), à les garder avec nous jusqu’à la prochaine poubelle. La vue de ces détritus dans des endroits paradisiaques est un non-sens trop important. Comment souiller de pareils endroits ?

Cette révolte qui gronde chez moi n’est pas pour moi ; elle est pour les futures générations qui n’auront pas la chance de voir ce que je vois, de faire ce que je fais.

La première et la plus importante des étapes pour changer les choses reste le comportement et la responsabilité de chacun.

Mais enfin, pour tout, il y a la chose et son contraire. La gentillesse, la conscience, les gestes pour l’environnement de ma collègue me rappellent que tout n’est pas perdu. Cette pralinoise est une sacrée femme. Nous nous rejoignons sur le fait de créer le moins de déchets possibles et de donner deux ou plus vies aux objets. Son ingéniosité m’épate (elle a créé des pochettes en carton de boîte de céréales qu’on pourrait facilement trouver dans les boutiques bobos-branchouilles) et sa générosité me comble (elle me nourrit de corossols, mangues et autres délices).

 

Beauté sous-marine

 

Nos aventures sous-marines nous ont menés à voir des espèces de poissons incroyables. Tout le spectre de l’arc-en-ciel y est passé, les couleurs fluorescentes et plus profondes également. Nous avons nagé dans un véritable aquarium à quelques mètres à peine du rivage à Port Launay. C’était d’une beauté bouleversante. Un calme, un équilibre, avaient rempli tout mon être. Ces créatures évoluaient sans crainte, parfois même avec une certaine curiosité pour ce nouvel arrivant (moi). Et je repensais au « Chercheur d’or » de Le Clézio et à sa description de Saint-Brandon ; un endroit où les créatures ne craignaient pas l’homme, où elles venaient à eux. Et hélas, aux hommes profitant de cette situation pour massacrer des tortues…

Comment peut-on mettre fin à cette beauté ? Qui sommes-nous pour cela ? Sans aller à l’auto-flagellation ou à la perte de l’espèce humaine, n’existe-t-il pas un équilibre, a minima, un respect pour la Vie ?

J’ai récemment regardé un film comique grand public dont je tairais le nom. Cette comédie récente (2016) résumait bien l’air du temps ; ça chambre toutes les cinq minutes, c’est méchant entre amis et surtout, ça ne respecte rien. Elle posait pourtant des questions intéressantes sur le décalage entre argument marketing et valeurs prônées mais ça s’arrêtait là. Oui, le grand public n’est pas source de délectation intellectuelle, j’en conviens. Mais pourtant, sans tomber dans le « c’était mieux avant », les comédies étaient plus fines et surtout, porteuses de messages plus profonds, ne serait-ce que dans les années 80. Comment en sommes-nous arrivés là ? A une telle médiocrité, une telle bassesse, une telle pauvreté ?

 

…et beauté végétale

 

Bien que le civisme n’y soit pas toujours de rigueur, je dois admettre que le réseau de transports en commun seychellois est bien fait. Pour un prix unique (5 roupies), on peut aller du Nord au Sud et prendre des chemins grandioses. Ainsi, le trajet Victoria-Sans souci-Port Launay était magnifique. La chaleur écrasante de la côte nous abandonnait comme nous montions vers les hauteurs. J’aime pouvoir m’enfoncer dans cette nature luxuriante ici. Son accès est très rapide et ses sous-bois tropicaux permettent de trouver une oasis de fraîcheur. Cette route sinueuse est le départ de beaucoup de promenades que je compte bien faire lors de mon séjour ici. Les abords du Morne Blanc semblent magnifiques et ses reliefs et horizons verts me font penser aux aventures d’Indiana Jones.

 

La semeuse

 

Du coup, le même cheminement reprend dans ma tête, toujours et encore, pour lutter contre la fatalité. Bien sûr, je suis limitée ; en temps, en capacités, en tellement de choses. Mais la flamme de l’espérance est allumée. Et ma mission concernant l’éducation brille comme une étoile. Je ne vais pas changer le monde, j’essaie simplement de semer des graines. J’essaie de transmettre ce que je peux ; des citations, des auteurs, des titres de chansons, de films, de bandes dessinées… De constituer une petite « carte au trésor » pour ces élèves en soif d’apprendre, de découvrir, de pousser les limites.

 

Lectures

 

J’ai littéralement dévoré « Les yeux jaunes des crocodiles » de Katherine Pancol. J’avais lu tous les autres épisodes de cette série et il me manquait ce dernier épisode, soit le premier. Ce n’est pas la première fois que je prends une série de livres dans le désordre. J’avais commencé à avec le cycle des vampires d’Anne Rice, débutant ma rencontre avec cette auteure avec « Le voleur de corps » (et en anglais s’il vous plaît !).

J’ai pris « La lumière qui s’éteint » de Rudyard Kipling et « Bettý » d’Arnaldur Indridason.

Du « Jardin du Roy » de Philippe Le Gall, je retiens surtout « Le Garçon Boucher ».

 

Salutations pianistiques

 

 

Rejouer du piano a été aussi bénéfique que de faire _enfin !_ des longueurs à la piscine. D’abord impressionnée par le niveau sonore de ce jeu piano d’étude, j’ai abandonnée rapidement mes mains au clavier. C’est drôle de jouer de façon si itinérante. Les pianos sont comme les gens. D’abord, on fait connaissance ; je joue un peu pour savoir comment il va. Ils ne sont parfois pas tout jeunes ou pas en très bonne santé (voir mon article sur le piano de Prospect Road à Adélaïde). Puis, on commence à engager la conversation ; je prends plus de libertés et il sonne plus fort. Et enfin, on s’entend et l’harmonie me donne la chair de poule. J’aime les différences que j’ai trouvé dans chaque piano, même le plus désaccordé : leur trait de caractère. Ceux-là ont un charme désuet et pourraient même permettre un style à part, le piano bastringue. Je suis toujours triste de les quitter…comme une personne avec qui j’aurais eu une bonne conversation. Car ils m’inspirent tous de façon différente. C’est assez drôle. C’est comme si chacun d’eux avait une mélodie secrète qu’il ne livrait qu’à ceux qui jouent sur eux, sur ces pianos d’étude bien rangés et peu usités.

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